Tout reprendre : l’outerwear

S’il y a bien des pièces qu’on a tendance à négliger lorsqu’on débute son parcours sartorial, ce sont sans aucun doute les pièces extérieures, manteaux, imperméables et autres blousons. Elles coûtent assez cher (un manteau habillé coûte autant qu’un costume) et ont un usage très saisonnier, donc limité. Pourtant, elles conditionnent totalement la réussite de notre tenue dès qu’on est dehors, et elles ont la responsabilité de nous maintenir au chaud l’hiver, ce qui n’est pas rien. Il est donc particulièrement important de bien déterminer de quelles pièces on a réellement besoin au quotidien, afin d’éviter des dépenses inutiles, ou pire, d’avoir froid tout l’hiver.

Toutefois, il ne faut pas pour autant oublier les pièces d’outerwear pour la mi-saison ou l’été, où elles peuvent remplacer dans des tenues plus décontractées une veste par exemple. Pour avoir une garde-robe polyvalente il est donc nécessaire de faire une analyse fine de son quotidien et de ses besoins.

Une histoire de matières

Le choix des matières va donc être ici assez simple. Globalement les laines sont nos meilleures alliées, que ce soit de la laine, du cachemire, du panno casentino… un bon drap de laine épais est idéal. Pour la mi-saison, en particulier le week-end, les choses évoluent, en particulier, on peut envisager du cuir, ce qui est plutôt rare et amène un peu de diversité dans la garde-robe, ou plus simplement du lin, du coton (même si tu t’en doutes, c’est moins ma tasse de thé).

Ces deux gros chevrons sont typiquement le genre de tissu que je choisirais pour un bon manteau d’hiver

Pièce n°1 : un manteau croisé épais

C’est certainement lui le plus important de toute cette sélection, il aura la lourde responsabilité de s’assurer de ton confort même les jours les plus froids de l’année. Selon moi afin de remplir son rôle au mieux, il faut un manteau croisé, afin de fermer le plus possible le passage au froid, alors qu’un manteau droit laisse une grande partie du torse à l’air libre. Bien sûr, plus il est long, plus il protège tes jambes, même si l’industrie a eu une énorme tendance à faire des manteaux courts, voire trop courts, au-dessus du genou, je pense que pour un manteau d’hiver, croisé de surcroît, arriver à la moitié de la jambe est une bonne idée. Pour le tissu, le champ des possibles est conséquent, une laine bien lourde, entre 450 et… 800g (oui c’est très lourd), avec plus ou moins (voire uniquement) de cachemire. Je resterais volontiers sur des couleurs sombres, assez passe-partout, gris, bleu, qui s’accordent avec à peu près tout. En revanche je ne choisirais pas forcément de l’uni. Ma préférence va sur un gros chevron, très large, plus ou moins contrasté. Mais un carreau peut s’envisager aussi, même s’il sera tout de suite moins formel.

La première option, la plus habillée est ce qu’on appelle un chesterfield, un manteau croisé, à cran aigu, avec des poches à rabat, simple, le top de l’élégance. Une pièce de choix dans un vestiaire, qui te donnera à n’en pas douter une allure folle. Vu le niveau de formalisme, dans le cas présent, de l’uni s’envisage, ou bien un chevron ton sur ton, pour donner de la texture.

un excellent exemple de chesterfield par Romain d’Ardentes Clipei

Autre option particulièrement valable, et particulièrement prisée des créateurs de contenus, est le polo coat. Voilà une pièce particulièrement intéressante du vestiaire masculin, créée à la base pour les joueurs de… polo logiquement, pour ne pas prendre froid lors des pauses pendant des matchs. C’est donc une pièce historiquement sportive, à la coupe ample, qui s’est petit à petit intégrée dans un vestiaire plus habillé et citadin, grâce à des coupes et une construction plus structurées. A quoi le reconnaît-on ? Eh bien déjà historiquement il est de couleur camel (voire en poil de chameau idéalement), le boutonnage est souvent un 6×3, et le col est un col Ulster (voir plus bas). Autre signe particulièrement distinctif, ce sont les poches dites « boîte aux lettres » particulièrement peu formelles, ainsi que des revers aux manches, plutôt sportifs eux aussi, on retrouve aussi soit une ceinture, soit une martingale à l’arrière. Puisqu’on est sur l’arrière, un des éléments particulièrement distinctifs est le double pli creux au centre du dos, optionnel, mais surtout le soufflet à fermeture à boutons qui remplace une fente sur la partie inférieure du manteau. C’est donc une pièce particulièrement complexe à réaliser ce qui a un impact sur son tarif (c’est en général la pièce la plus chère d’une collection).

Tu peux voir ici tous les détails du polo coat, en particulier à l’arrière, cette fermeture boutonnée caractéristique

Stylistiquement entre ces deux options, il y a l’ulster coat. Qu’est-ce ? Eh bien prenons un manteau croisé type chesterfield, le plus gros changement c’est le col, au lieu d’un revers à cran aigu, le cran de l’ulster coat, est à l’horizontale, voire tombant, cela donne un côté plus décontracté et, surtout cela permet d’avoir une vraie protection lorsqu’on relève le col du manteau, alors que c’est globalement inutile avec des revers classiques. C’est ce qu’on appelle le col (ou le cran) Ulster. Pour le reste, c’est un mix entre le chesterfield et le polo coat, tout est envisageable, poches à rabat ou plaquées, martingale, revers de manches, c’est un peu le fourre-tout où chaque marque peut se distinguer par ses choix de détails. Historiquement en tweed, on peut choisir une matière un peu moins abrupte, comme pour le chesterfield (la frontière entre un polo coat et un ulster camel est assez imperceptible, si ce n’est le soufflet).

Difficile de mettre tout le monde d’accord sur la différence entre Ulster et Polo, tu pourras trouver de tout sous les deux noms

Pièce n°2 : Une pièce de pluie

Autre grand classique, indispensable bien sûr, est une pièce plus adaptée aux journées pluvieuses. Le grand classique, selon moi est un manteau inventé par Thomas Burberry en 1914 pour répondre au besoin de l’armée anglaise pour ses officiers dans les tranchées… le trench. Quelques années après avoir inventé un tissage particulièrement serré rendant le tissu en coton ou laine comme imperméable, la gabardine, Thomas Burberry lui trouve donc un usage parfaitement adapté. Le trench est une pièce particulièrement complexe, avec une quantité de détails impressionnante: manches raglan, boutonnage 10 boutons, fausses poches qui sont des ouvertures vers les poches du pantalon, ceinture avec crochets en métal (pour attacher des grenades ou une épée d’officier selon les sources) qu’on n’attache JAMAIS via l’ardillon mais qu’on noue, attache au col pour le maintenir fermé relevé, seconde couche de tissu à l’avant de l’épaule là où on pose un fusil… Bref une vraie pièce d’amateur. Historiquement on le fait en beige/kaki, bleu marine voire noir. C’est un très grand classique, bien long c’est une bonne protection au quotidien qu’on peut rendre encore plus polyvalente avec une doublure en laine amovible. Malheureusement c’est une pièce forte, que tous n’osent pas porter. La version édulcorée est le Macintosh, un imperméable beaucoup plus simple à boutonnage droit et col chemise, je l’ai toujours trouvé d’un ennui particulièrement trop important pour le porter (mais ça reste un grand classique).

Un excellent exemple de trench par la boutique Mettez à Paris

L’autre option tout aussi historique, est une veste en coton cirée, dont le plus grand représentant est Barbour, expert sur le sujet dont les modèles historiques, Beaufort et Bedale sont des grands classiques. Bien pratiques avec toutes leurs poches (ah la gibecière, si pratique même en ville), elles sont quand même moins adaptées à un costume selon moi (mais bon, s’il pleut…). En s’achetant une veste Barbour, on s’achète un peu de l’histoire du vêtement, la marque n’ayant pas dégradé son produit (contrairement à Burberry), 400€ pour une veste qui pourra durer des décennies (et peut être recirée régulièrement). Bien sûr d’autres marques en produisent, mais je ne suis jamais allé chercher plus loin (d’autant plus qu’on en trouve très facilement en seconde main).

Un intemporel, et increvable du vestiaire anglais, indispensable dans toute garde-robe

Pièce n°3 : Un manteau droit léger

La troisième pièce intéressante dans un vestiaire, entre le manteau d’hiver et celui de pluie, c’est un manteau adapté aux saisons plus douces, le printemps, l’été… Le grand classique anglais est le covert coat. C’est un manteau assez simple, boutonnage droit, cran sport, assez court (juste au-dessus des genoux), poches à rabat (souvent avec une poche ticket). Son nom vient du tissu utilisé en général pour le réaliser, le covert cloth, un twill de laine assez rustique, particulièrement adapté pour une pièce d’extérieur, on lui ajoute souvent un col en velours. La couleur habituelle est souvent marron, même si on peut envisager du vert olive ou militaire, du bleu ou du gris.

un parfait exemple de covert coat

Une autre option me plaît beaucoup, est une pièce dont on parle assez peu en France, notamment car sa version historique est vite connotée, c’est ce qu’on appelle un cache-poussière. Mais si, tu sais, ce manteau utilisé à outrance dans les westerns, fait avant tout pour protéger de la salissure, sans forcément réchauffer. Dans l’idée ça peut paraître un peu désuet. Mais je discutais il y a quelques années avec un façonnier qui en avait imaginé une version plus actuelle et citadine. L’idée était qu’avec le climat actuel, on a un automne doux plus long pour lequel le covert coat est trop chaud et qu’on passe ensuite rapidement à des pièces plus hivernales. Son idée ? Repartir de ce fameux covert coat, mais avec une construction napolitaine, un entoilage très léger (voire pas d’entoilage du tout), une épaule chemise, un tissu beaucoup plus léger, avec un poids de tissu de costume (j’avais proposé un tissu Drago Super 120’s imperméable), non doublé, quelque chose de vraiment léger pour les premiers jours un peu frais. J’y travaillerai un jour, pour me commander cette pièce parfaite….

Pièce n°4 : un blouson en cuir

Passons enfin aux pièces dédiées aux jours de repos. J’ai rarement trouvé les blousons particulièrement inspirants, sauf s’ils sont en cuir. C’est pourquoi j’ai toujours aimé ce genre de pièce forte pas toujours attendue dans un vestiaire sartorial. Je vois deux options intéressantes, la première serait un blouson Valstar, le plus sport, une pièce iconique chargée d’histoire. Marque d’origine britannique, c’est en s’installant à Milan en 1911 qu’elle prend le nom de Valstar. Son succès vient de la création d’une veste en cuir très fine inspirée de la veste d’aviateur A1 de l’armée américaine, un énorme succès commercial et marketing. Que ce soit un original, ou une version de n’importe quelle autre marque, c’est une pièce agréable à porter, la mienne est toujours de la partie pendant mes vacances, pour les petites fraicheurs des soirées d’août ou juste pour stocker ses effets dans des poches.

Encore une pièce historique, simple, mais bien pratsque

Une autre approche plus sartoriale, serait une pièce que j’aime beaucoup en particulier chez Rifugio, une saharienne en cuir, totalement déstructurée, un très léger nubuck c’est à la fois particulièrement élégant et agréable. Je sais que c’est une pièce peu prisée en France mais qui a à mon avis toute sa place dans notre vestiaire.

Voici une option qui sent bon la nonchalance et les vacances en bord de mer

Pièce n°5 : une saharienne

Est-ce une pièce d’outerwear ou une veste ? Un peu des deux peut-être, la saharienne est mon option estivale préférée, en lin, particulièrement légère, avec plein de poches, c’est selon moi un indispensable de notre vestiaire, lorsque les températures sont un peu trop hautes, on peut casualiser nos tenues avec cette pièce. Très à la mode depuis quelques années, c’est là-aussi un idéal pour les voyages / vacances. Ma saharienne actuelle sert tout l’été, je lui ajouterais d’ailleurs bien une paire d’autres, afin de piocher allègrement dans les liasses de la Maison Hellard.

autant veste que remplaçant de sac,la saharienne est un classique d’inspiration militaire

Voici donc une petite sélection de pièces qui je pense permettent de couvrir tous les besoins du sartorialiste moderne. Plus le temps passe et plus l’envie de lancer des commandes de ces pièces est forte, tant il y a de détails intéressants et de tissus particuliers à travailler sur les pièces extérieures, de beaux projets à l’horizon !

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